PFH* et Transformation des organisations

Après 15 ans d'accompagnement et de pratique de l'analyse du cycle de vie, je constate que nous avons beau disposer d’une quantité d’informations grandissante sur l’état de notre planète, être entouré de spécialistes du sujet, d’acteurs engagés, imaginer des plans de réduction d'impacts ambitieux, des stratégies de long terme, mettre en place des actions… nous atteignons rapidement les limites de nos approches traditionnelles et nous avons des difficultés à entrer dans une démarche de sobriété réelle, à tenir les ambitions de nos plans passés la phase pilote. Pourquoi ? Pourquoi, passer la phase pilote nous retournons dans nos habitudes ? Pourquoi mettons nos projets sont-il happés par l’économie traditionnelle ?.

Entre accompagnateur.rice.s, nous en discutons souvent et nous partageons un constat : Passer la période de la sensibilisation, parfois la période des projets pionniers, étendre une transformation à l’ensemble d’une organisation est complexe. Les camps « écolos » vs « business as usual » commencent à s’affronter et une bataille culturelle commence

Préambule - PFH de quoi parle-t-on ?

Dernièrement j'ai pu assister à plusieurs ateliers/fresques de sensibilisation. Il y a beaucoup été question du PFH* - Putain de facteur Humain... Ce terme utilisé a outrance m'a un peu déstabilisé, comme si notre condition d'humain était une des raisons de notre échec à la transformation et parfois une excuse pour ne pas bouger, rester immobile et poursuivre notre destruction du Vivant.

Depuis 3 ans, je travaille à réconcilier les Humain.e.s, les Organisations et le Vivant et à donner une place de choix au Précieux Facteur Humain par l'écopsychologie et les constellations notamment, et je vois a quel point cela est précieux et me permet d'aller plus en profondeur dans mes accompagnements, d'être plus radicale et d'obtenir des résultats de longs termes. Je vous partage donc quelques réflexions

Quelle place pour les tensions et les émotions dans l'accompagnement des transformations ?

Pour lancer une démarche dans une organisation, nous nous appuyons sur une ou deux success stories, nous arriverons à convaincre des bénéfices de telles ou telles démarches : Que ceux qui ont réussis sont inspirants, nous masquons les difficultés, laissons dans des angles morts les durées de transition… Les réussites sont bien évidemment inspirantes; ce sont les graines de l’Utopie à laquelle nous aspirons et les marques qu’un autre futur est possible.

Mais sur le terrain, ces exemples sont souvent accueillis par des « Oui, Mais… » : « Oui mais dans mon cas, c’est différent… », «Oui mais face au marché chinois… », « Oui mais nos concurrents s’en fichent… », « Oui, mais ce n’est pas ce qu’attendent nos clients… »

Lorsque nous lançons un nouveau projet, nous avons tendance à mettre ces « oui mais » à la trappe et à nous entourer de pionniers engagés pour lancer les démarches, mais à oublier tous les autres en pensant que nous saurons les convaincre par l’exemple.

Nous oublions que ce sont ces « oui mais » qui reviendront dans la bouche de nos partenaires, financeurs, clients… et qui viendront perturber le développement de nos projets rêvés.

Ce sont ces « Oui, mais… » non entendus et accueillis, qui sont à l’origine de bien des échecs et qui nous font rager et en venir à penser que ce « PFH – « putain » de facteur humain » nous empêche de changer.

Et si nous écoutions les « Oui, mais … ? »

Écouter les « Oui, mais… » Permet de comprendre les peurs, les réticences, les attachements de chacun.e. Écouter ces objections, c’est leur offrir de l’empathie, c’est aussi identifier ce qu’ils cachent : les besoins de sécurités financières des uns, la peur d’être déstabiliser par le changement, la crainte de perdre en confort, la peur de trahir un héritage … Toute cette matière qui utilisée à bon escient permettra de créer un projet robuste et au service du Vivant.

Respecter le rythme de la transformation des individus, garantit de trouver des solutions adaptées et ambitieuses qui seront portées par l’ensemble des représentants de l’organisation.

Contrairement à ce qui a été véhiculé durant les dernières décennies, les émotions, les ressentis, les intuitions ont toute leur place dans l’organisation, puisque c’est cette énergie qui permet d’avancer. Ecouter les émotions des un.e.s et des autres permet l’innovation, le respect, la connexion et ainsi de créer des projets coopératif et respectueux du vivant.

En conclusion

A trop vouloir s’accrocher à des approches « rationnelles », « cartésiennes »,… nous oublions que nos organisations sont portées par des humain.e.s mu.e.s par leurs émotions et leurs attachements en complément de leur raison. Ignorer cela, c’est sombrer dans l’irrationnel, … Cela conduit nos projets au pire à l’échec, au mieux à un consensus mou qui n’est pas à la hauteur des enjeux.

Si nous commencions par prendre soin de toutes ces voix ! Si nous avions la capacité d’écouter ce qu’elles ont à nous dire entre les lignes (les résistances, les attachements…). Nous pourrions compter sur le Précieux Facteur Humain, cette capacité à s’entraider, à trouver des solutions ensemble. Nous opérerions une transformation moins rapide, mais plus radicale et plus profonde. Nous aurions la capacité de choisir la voix de la santé commune et de la robustesse chères à Olivier Hamant.

Cela n’est pas aisé. Cela nécessite de transformer nos manières d’être en relation, de travailler, de concerter nos parties prenantes mais cela est indispensable pour  sortir de la société du Burn Out : Burn Out professionnel, Burn Out militant, Burn Out de la Terre.